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Social Media : l’éphémère crée la dépendance

1906 Vues(s) 21 novembre 2018

Une capacité d’attention fragmentée et en baisse

 

En 1969, Herbert Simon, économiste américain et Prix Nobel d’économie, travaille sur la rationalité limitée des individus : « Une abondance d’information créée une rareté de l’attention et le besoin de répartir efficacement cette attention parmi la surabondance des sources d’information qui peuvent la consommer. » Une citation qui n’a pas pris une ride ! Sans cesse sur-sollicités (notifications, infobésité, etc.) nous serions désormais capables de rester concentrés seulement 8 secondes. Le développement de formats courts s’est donc imposé et leur consommation a explosé.

 

 

L’effet FOMO

 

Les stories permettent de créer des histoires à partir de fragments de réalité. Leur caractère éphémère oblige les communautés à les suivre et les consommer en temps réel, au risque de les voir disparaître à tout jamais. En jouant sur des mécanismes psychologiques, les stories sont telle une drogue et entraînent une dépendance.

 

Sociologiquement, nous tendons également vers le phénomène de FOMO (Fear Of Missing Out), réel trouble psychologique lié notamment aux réseaux sociaux et à la peur de passer à côté d’histoires bien plus intéressantes que celles que l’on vit au moment présent.

 

Depuis août 2018, Instagram teste et déploie d’ailleurs plusieurs fonctionnalités en ce sens, offrant alors aux utilisateurs du réseau social une expérience de navigation “optimale” leur permettant de ne pas passer à côté des stories et donc du contenu créé par leur communauté :

 

  • une barre persistante (en test) ressemblant à un sticky menu d’un site web. En d’autres termes, dans un bandeau dédié, les stories sont toujours visibles en haut de l’application et cela tout au long du scroll dans le fil d’actualités. Une bonne manière de créer une persistance rétinienne mettant en valeur les stories Instagram et incitant alors les utilisateurs à adopter des réflexes de consommation.

 

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Source : The Verge

 

  • un message inséré entre deux publications informe l’utilisateur lorsqu’il a vu l’ensemble du contenu partagé (voir image ci-dessous). Un bon moyen de pousser la communauté à la consommation et de faire en sorte qu’elle revienne régulièrement prendre son shot de nouveautés.

source image : Instagram

 

Ce design de service insidieux, appelés dark patterns est créé pour manipuler les choix rationnels des utilisateurs et instaurer des biais cognitifs dans la tête des individus. Un concept marketing vieux comme le monde mais d’autant plus puissant maintenant que les plateformes social media peuvent finement tracker les activités de leurs utilisateurs. Ainsi, Instagram sait quel contenu est susceptible d’engager chacun par exemple.

 

De nombreux anciens salariés des GAFA (Acronyme : Google, Amazon, Facebook, Apple) et notamment Tristan Harris (ancien ingénieur Google) dénoncent ces pratiques ayant un effet néfaste sur la psychologie des individus. Un contre-pouvoir qui lutte contre l’économie de l’attention et le pouvoir de la déconnexion.

 

Du temps bien passé

 

Dans ce contexte de fronde des “déconnexionnistes” et autres mouvements de fond venant quelque peu ébranler le tout-puissant navire Facebook, son PDG Mark Zuckerberg annonçait dans sa dernière keynote (mai 2018) qu’il souhaitait que les utilisateurs passent du “temps utile” sur les réseaux sociaux. La firme du même nom et Instagram déploient tous deux (août 2018) une fonctionnalité de mesure du temps passé sur les réseaux sociaux. (disponible dès aujourd’hui sur vos applications mobiles)

 

Dans chacune des applications, les utilisateurs ont :

 

  • un tableau d’activité du temps qu’ils passent sur Facebook et Instagram ;
  • un rappel quotidien les informant de l’atteinte du temps qu’ils souhaitaient passer sur Facebook et Instagram ;
  • une limitation des notifications avec un mode “mute” s’ils souhaitent ne pas recevoir de notifications pendant un temps donné afin de rester concentrés.

 

Pour y accéder allez dans les paramètres de chacune des applications.

 

time-tracker-instagram-facebook

 

Cette nouvelle fonctionnalité va permettre aux utilisateurs de prendre conscience du temps qu’ils passent sur Facebook et Instagram leur offrant la possibilité de contrôler, voire limiter leur consommation social media parfois non raisonnée. Une décision cependant étonnante étant donné le business modèle de ces plateformes reposant sur le temps passé et la vente de publicités.

 

Les destinations touristiques devront donc relever un challenge d’autant plus important pour être visibles auprès de leur communauté, car le temps est compté, l’attention d’autant plus précieuse. Pas de panique, avec une bonne gestion du community management, de bons contenus et une stratégie social media optimisée, tout devrait bien se passer 😉